Image acoustique de l’espace

Bien qu’habituellement nous appréhendons l’espace par tous nos sens, c’est, dans un espace éclairé,  principalement la vision  que nous utilisons pour saisir son volume et ses constituants. Mais dans le noir ou pour un aveugle, l’écholocation devient le vecteur principal prenant le relais pour donner une « image acoustique » de l’espace.
L’écholocalisation qui est le retour des sons émis soit par une source sonore existante in situ (radio, gens qui parlent, bruits de machines, etc…) ou par le bruit que l’on fait soi-même (voix, canne, pas, …) produit une image globale de l’espace, de sa dimension, de son ampleur, voire de sa configuration à partir de laquelle on se trouve et qui nous permet de nous situer, de se diriger, d’avancer.

 

Pour les aveugles, c’est un outil primordial: quelques témoignages :
C’est la résonance d’une pièce qui me frappe en premier lieu, c’est l’impression par laquelle on va en prendre connaissance. le son permet de nous orienter. (Roger)
Grâce à la sonorité, nous obtenons une rapide indication sur les volumes de la pièce dans laquelle nous entrons. (Pierre)
Dans un espace que je ne connais pas, je pratique l’écholocalisation. Je claque des pieds ou des doigts pour parvenir à déterminer les dimensions de l’espace par l’acoustique de la pièce. Je ne crois pas qu’il soit possible d’avoir une pièce sans résonance, mais si cela arrivait, ce serait effectivement désagréable parce qu’il n’y aurait aucun moyen rapide de dimensionner l’espace, il y a toujours les informations tactiles par les pieds, les mains, mais nous ne pouvons pas toujours effectuer le tour de la pièce.  (Alain)
Je me crée des repères auditifs comme le tic-tac d’une horloge, une fontaine. Ce sont des éléments sonores qui me guident et qui éveillent ma curiosité, je suis interpellée et poussée en avant dans ma découverte du lieu. (Géraldine)
J’utilise beaucoup la résonance, la résonance de cette pièce n’est pas élevée ce qui me permet de savoir qu’elle est petite, plus petite en tous cas que les bureaux de mes collègues dans lesquels la résonance est forte. L’écho aide énormément à dimensionner les pièces. (Stephane).
Lorsqu’il y a trop de bruits, nous sommes tout à fait perdus. C’est notre sens de l’orientation qui est perturbé ou, en tous cas, nous le ressentons comme tel. (Myriam)
L’excès de bruit nous empêche de discerner les choses. A table, chez moi, si mes enfants font trop de bruit, je ne parviens plus à les situer dans la pièce tellement les bruits me perturbent. Sans l’ouïe, plus rien ne nous raccroche aux autres, nous nous sentons seuls et perdus, les repères nous manquent. (Lucienne)

(in: Nathalie Van Meerbeek, « Une qualité architecturale au-delà de la vue », mémoire ISACF-La Cambre, 1999, p. 28 et annexes)